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Les vidéo clubs en France

Après un rapide état des lieux, qui permet de recenser l’existence de 2000 magasins pratiquant la location, 1000 vidéoclubs considérés comme des clients réguliers, et qui ont en moyenne un chiffre d’affaires variant de 80000 à 120000 francs par mois. Yves Saint- Martin décrit en détail le changement d’état d’esprit du consommateur. « Jusqu’en 1984-1985, les vidéophiles étaient des grands consommateurs d’images. L’arrivé de canal + à représenter un grand choc plus psychologique que concret. Mais c’est surtout en Mars 1986, la création de la 5 et de M6 qui a provoqué une baisse d’au moins 30% de la fréquentation des vidéoclubs. Depuis cette date, les gens ne bouffent plus de l’image vidéo, mais consomment avec modération des images de qualités qu’ils ne trouvent pas dans la télévision. Aujourd’hui, le parc de magnétoscopes est d’environ dix millions d’appareils, et si nos clients louent moins, ils sont de toute façon plus nombreux. En moyenne un client dépense entre 600 et 1000 francs par an en location vidéo, mais est plus sensible au temps qu’il fait ou à la crise dans le Golfe. »
video futur
Autant de réflexions confirmées par celles de Jean Pierre Warnke- Dhérines : « Si nous avons vécu la multiplications des chaînes comme traumatismes, le problème de fond est réglé et le marché est reparti sur un bon rythme. Ce n’est pas le cas de marchés énormes comme ceux de l’Angleterre, de l’Allemagne et, à un degré moindre, de l’Espagne, qui prennent aujourd’hui de plein fouet l’apparition de nouvelles chaînes. Les résultats de l’Angleterre par exemple ont chuté de 40 % par rapport à l’an dernier, essentiellement à cause du boom de la réception satellite.» En France, nous avons donc essuyé les plâtres avant tout le monde et la clientèle fréquente de nouveau les vidéoclubs avec, de surcroît, l’arrivée massive, depuis deux ans, de la génération des dix-huit/vingt-cinq ans qui est née (ou presque) avec le média vidéo. Philippe Fakhreddine aborde alors le problème de la distribution et la difficulté que peuvent avoir les vidéoclubs à rentabiliser des investissements lourds. Le chœur des éditeurs donne des éléments de réponses à cet aspect «technique». Henri Lénique : « Les vidéoclubs ont un comportement d’adulte et n’achètent pas les titres vendus trop cher.» Alain Carradore : «En dix ans, personne n’a trouvé le moyen d’adapter ses prix à la grosseur variable des vidéoclubs pour leur permettre d’avoir assez d’exemplaires de chaque titre.» Jean-Pierre Warnke-Dhérines : «Nos études ont permis de constater que le prix n’influait pas sur la quantité de cassettes achetées. Si les 2 000 vidéoclubs de France s’engagent par écrit à acheter plus si je baisse mes prix, je m’exécute immédiatement.» Philippe Fakhreddine élargit le débat en proposant une solution : « Depuis l’avènement du Marché de la vente, les éditeurs ont deux moyens d’amortir leurs produits. Pourquoi ne pas baisser les tarifs des cassettes pour les vidéoclubs afin de les dynamiser et de rentabiliser encore mieux avec la vente?» Fervents lecteurs de Vidéo 7, vous savez depuis longtemps que la vidéo est le seul média qui bénéficie de deux marchés parallèles, la location en vidéoclubs d’une part et la vente en grandes surfaces et dans certains vidéoclubs ou magasins vidéo d’autre part. C’est en fait ce concept de location qui a toujours eu et a toujours du mal à passer dans les mentalités françaises. Ce qui permet à Alain Carradore de répondre à Philippe Fakhreddine : «Nous avons besoin des deux marchés pour rentabiliser l’achat des films en tant qu’éditeurs indépendants.» Et Jean-Pierre Warnke-Dhérines de confirmer : «Pour une major compagnie comme CIC, le problème est quasiment le même dans la mesure où nous devons faire remonter le plus d’argent possible dans tous les créneaux d’exploitation (cinéma, vidéo location, vidéo vente, Canal + et autres chaînes dans l’ordre, NDLR) pour pouvoir produire de nouveaux films qui coûtent très cher.» Yves Saint-Martin regrette tout de même que les éditeurs ne fassent pas plus de promotion, et surtout par l’intermédiaire de la télévision, sur les films qui sortent en cassettes à la location.

Henri Lénique et Jean-Pierre Warnke-Dhérines estiment qu’il faudrait une vraie «collective» de la profession pour investir sur le thème : «louez des cassettes vidéo», un slogan proche de ceux employés dans d’autres corporations plus soudées. Dans cette optique, Alain Carradore donne un argument de poids : «Nous avons vendu 4 500 cassettes de « L’union sacrée » aux vidéoclubs. En moyenne, chaque cassette a été louée cent fois, ce qui représente près de 450 000 foyers touchés. Nous avons effectué, quelques mois plus tard, 40 000 ventes du même film. Faites la différence. S’il est difficile de comparer les deux marchés, on peut penser qu’il serait intéressant d’investir plus dans la promotion des titres à la location.» Une réflexion pertinente de Philippe Souplet : «Les éditeurs ont essentiellement communiqué ses dernières années, et surtout depuis un an à la télévision, sur les films à la vente. Ils ont donc fait croire au grand public que la cassette était uniquement un produit vendu, oubliant l’énorme marché que représente la location.» «En résumé, nous faisons la promotion d’un produit à la vente alors que nous faisons la promotion d’un concept pour la location. Et il est beaucoup plus difficile de faire passer un concept qu’un produit dans notre pays, peu habitué à la consommation locative», renchérit Jean-Pierre Warnke-Dhérines. Yves Saint-Martin propose alors une pratique simple qui pourrait avoir de belles retombées. «Si les éditeurs pouvaient, au début de chaque cassette, mettre un rappel de leur catalogue de nouveautés à la location, cela aiderait sûrement ceux que l’on appelle désormais des magasins vidéo plus que des vidéoclubs, cette dernière appellation n’ayant pas les suffrages des médias, des financiers et surtout de la clientèle.» Cette dernière réflexion suscite déjà une idée pour un débat à venir. Mais d’autres questions se posent. Que sera le marché de la vidéo dans dix ans? Quelle forme auront les magasins vidéo dans l’avenir?

L’arrivée du laserdisc va-t-elle bouleverser l’ordonnancement d’un marché désormais stabilisé ? Que représente le marché du X? Comment va évoluer la législation avec l’Europe de 1992? Autant de questions, et bien d’autres, auxquelles nous essaierons de répondre avec de nouveaux invités dans les mois à venir.

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